Un coin oublié (avant 1940)
Un coin oublié (avant 1940)
Ce jour je vous convie à une promenade insolite. Après le passage des « Traverse », la fontaine, la Fange, nous voici devant la Croix. Laissons la piste carrossable sur notre gauche et prenons le sentier muletier. Une pente courte mais raide envahie par des broussailles nous attend. Nous nous frayons un chemin au milieu de cette végétation et arrivons sur la route d'Ullion, plus large et à pente raisonnable. Nous la suivons un bon moment, passons sous le Peuil, les Serres et découvrons à notre droite un petit chemin que nous empruntons. Nous sommes à La Balma, une campagne d'oliviers avec quelques sorbiers qui apportent une touche plus vive. Au fait ce petit chemin est peut être encombré de gravats, tous ces déblais projetés d'en haut lors de la construction de la piste. N'importe, il faut traverser La Balma. Un ravin arrête notre progression. Il n'est pas très profond mais il faut passer sur l'autre bord. Nos anciens ont construit un petit passage de terre pour le traverser.
Changement de décor de l'autre côté de la ravine. Plus d'oliviers, de sorbiers, mais des genêts, du maquis ras, et des pierres. Nous avançons en montant légèrement et tout à coup nous nous arrêtons, médusés. Deux hautes parois rocheuses se font face et entre les deux, une multitude de rectangles bien dessinés, entourés de pierres s'offre à nos yeux. Non, ce n'est pas un cimetière, ce n'est pas un lieu de culte Inca mais tout prosaïquement : « le séchoir à figues ». Ces séchoirs s'échelonnent très haut entre ces deux pans de montagne. Je me souviens d'avoir encore dans les années quarante avec maman, apporté un panier de figues que j'ai étalées sur notre parcelle, dûment cadastrée. En effet, chaque lot a son propriétaire.
Maintenant, si vous levez les yeux tout en haut de la montagne vous apercevrez une petite construction en dur, accrochée à la roche. Que vient faire cet édifice dans ce lieu désert, sous le chemin d'Ullion et pratiquement invisible du sentier ? Et quel est l'acrobate qui a osé bâtir en ce vertigineux endroit ? La légende dit que c'est là que le clergé venait cacher les trésors de l'église au moment des invasions pour les soustraire au pillage.
Si la curiosité vous pousse à aller dans cet endroit désert pour voir ce que les intempéries nous ont conservé, ayez une pensée pour ces ancêtres qui étaient probablement illettrés mais qui faisaient preuve de tant d'intelligence et de prodigieuse ingéniosité.
Nice, mai 2014
N.B. Je me souviens soudain qu'une partie commune relie la piste et le sentier. La jonction doit se faire en aval ou au niveau de La Balma. Il est donc plus sûr de prendre la piste plutôt que d'emprunter un sentier laissé à l'abandon.