Qui est le plus fantaisiste ? « L'horloge ! » ou « Les trois mariols !»

Qui est le plus fantaisiste ?  « L'horloge ! »    ou    « Les trois mariols !»

          C'est une belle matinée d'été des années début 1940 Monsieur Philip, retraité, se promène devant le presbytère quand soudain lui parvient une voix de très haut. C'est Sandri, qui fait office de sacristain qui l'interpelle du clocher. Il doit remettre la grande horloge rustique à l'heure, mais voilà ! Il est là-haut, a fait un peu d'acrobatie dans un escalier branlant, et il n'a pas le principal : l'heure exacte.

« Hé, moussu Philips, sapés que ora é? »

« Non, Sandri vo demanda à Giousèp (Joseph) Testous »

          Joseph Testoris habite là, à trois pas de l'église et possède, peut-être est-il le seul en ce début des années quarante à avoir la T.S.F. (on disait la teu-seu-feu). Joseph consulte son cadran, bien à l'heure. Il est dix heures. Mais pense-t-il, notre horloge prend rapidement beaucoup de retard, aussi répond-il à Monsieur Philip :

«  Es dis ora e un quart »

          Monsieur Philip fait les trois pas vers le presbytère mais il a eu le temps de penser comme Joseph. Aussi crie-t-il à Sandri :

« Eh Sandri é dis ora e meggio »

          Et Sandri qui connait bien le retard de son horloge avance tout simplement son cadran d'un petit quart d'heure. Voilà comment il est 10 heures mais qu'à Marie c'est déjà 10h45 !!!
          Croyez-vous que cela pertube les Mariols ? Pas du tout. Ils ont le soleil qui les renseigne sur l'heure. Tiens, c'est le moment d'arrêter de couper les raisins, il faut manger une petite collation ! Tiens, le soleil a tourné derrière ce piton, il est temps de rentrer. C'est ainsi que vit Abel Giuge, le conteur du village, le père de Titin, dans une oasis de verdure, de fleurs, d'arbres fruitiers, d'une belle vigne, au milieu d'un désert de pierres, de ronces qui l'entoure.

Abel

Abel le conteur

          En face, de l'autre côté du vallon d'Ullion, il voit passer les chamois sur la montagne. Un jour un chamois a dansé devant lui sur le sentier, une autre fois son chemin a été coupé par une laie qui traversait avec ses petits. Là, il a eu peur et s'est plaqué contre le talus. Il raconte aussi comment les oiseaux tombés du nid sont nourris sur le sol par de vaillantes oiselles.

          Depuis Abel nous a quittés, et l'horloge, électrifiée, nous donne l'heure exacte.

Nice, avril 2014

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